dimanche 12 septembre 2010

Zidane et son coup de boule

« Zidane n'a pas raté son rendez-vous avec la grandeur. Il a raté la grandeur que tout le monde ambitionnait pour lui mais a réussi son échec d'une manière si éclatante qu'il l'a renversé en succès. "Il n'appartient qu'aux grands hommes d'avoir de grands défauts", dit La Rochefoucauld. C'est pour cela que Zidane ne s'excuse pas. »
 
Ollivier Pourriol, philosophe. Libération, 8 mai 2010


« Zidane a mis un coup de boule mais cela veut dire beaucoup de choses. Il va faire une finale de Coupe du Monde comme il jouait en bas de son immeuble, gamin. Il tire son pénalty avec une pichenette, ce qui est plus fou pour moi que de mettre un coup de boule à Materazzi. Le football pour lui, c’est le plaisir du jeu. Il n’était pas dans la logique de l’exemple. Il n’a pas calculé. Mais attention, je n’encourage pas non plus à mettre des coups de boule. »

Eric Cantona. L’équipe magazine, 28 avril 2007

lundi 6 septembre 2010

Le footeux est un chasseur qui s'ignore


« Il n'y a pas d'autre jeu qui permette de retrouver de façon aussi nette nos vieilles sensations primaires des exploits de la chasse. Lorsqu'on aura complètement paralysé et tué le chasseur intérieur, on arrivera à la certitude qu'il n'y a rien de plus stupide au monde que les réactions des footballeurs après un but. Ce qu'on voit là frôle en effet l'obscénité. Comparée à ces étranges orgasmes de buteurs, offerts à un public payant, une actice de porno devrait se sentir honteuse. Mais dès qu'on abandonne cette idée de meurtre contre le chasseur intérieur et qu'on accepte la survivance des sentiments du chasseur archaïque, on comprend tout de suite ce qui se passe sur le gazon. C'est là que se rejoue la scène la plus ancienne de gratification humaine : atteindre par un objet balistique sa proie qui se défend de toutes ces forces. Je pense qu'à ce moment-là, il convient d'introduire le terme de deep play. Il désigne ces genres de jeux qui enthousiasment l'homme dans son entier. »

Peter Sloterdijk, philosophe. Le Point d'après Der Spiegel, 15 juin 2006